Querelle

S’il est, dans la littérature française contemporaine, une œuvre provocante, sulfureuse, irrécupérable, c’est bien celle de Jean Genet. En dehors de son propre essai cinématographique (« Un chant d’amour 0, les adaptations n’ont jamais été très convaincantes, que ce soit « Le balcon » de Joseph Strick ou « Mademoiselle » de Richardson (avec, déjà, Jeanne Moreau). En revanche, comment imaginer un cinéaste plus proche de son univers que l’Allemand Fassbinder ? Il était donc évident, logique, voire inévitable, que celui-ci tente une traduction visuelle de cette œuvre hantée par le désir et par la mort.Querelle Transposition du roman « Querelle de Brest », ce film crépusculaire restera le dernier de Fassbinder, qui mourut juste après avoir achevé le montage. Étouffant, envoûtant, entièrement baigné d’une lumière cuivrée, il est bien à l’image de son modèle. Théâtre de son jeu morbide et fascinant le port de Brest, reconstitué par un vaste décor fantasmatique de carton-pâte. Héros : un séduisant marin nommé Querelle (Brad Davis), aimé en secret par son lieutenant (Franco Nero), jouet et instigateur des intrigues qui s’ébauchent autour d’un bar bordel où se rencontrent les marins, sous l’œil du patron herculéen et de l’ensorcelante chanteuse Lysiane (Jeanne Moreau)… Rapport d’amour et de haine sous le signe de l’homosexualité, distillée en images crues de sexe et de meurtre…

Retour

1968, les États-Unis sont engagés depuis quatre ans dans le conflit vietnamien et cette guerre qui n’ose pas encore dire son nom, commence à diviser le pays. Après le départ de son mari, capitaine dans les marines, une jeune bourgeoise californienne se fait embaucher comme auxiliaire dans un hôpital pour anciens combattants. Au pavillon des paraplégiques auquel elle a été affectée, elle retrouve un ancien camarade d’université qui a perdu l’usage de ses jambes au Vietnam. A son contact, elle va apprendre à connaitre le vrai visage de la guerre et à en accepter l’horreur dans sa vie quotidienne. Le film, parallèlement, dessine l’itinéraire d’un autre soldat qui ne saura pas surmonter cette expérience et ira jusqu’au bout de sa destruction. Conçu dans la seconde moitié des années 70, cinq ans après que les armes se soient tues, « Retour » est né d’une étroite collaboration entre Hal Ashby et le scénariste Waldo Salt, victime de la liste noire qui l’avait longtemps empêché de travailler pour Hollywood avant son retour avec « Macadam cowboy » pour lequel il obtiendra l’Oscar du meilleur scénario en 1969. Et aussi de Jane Fonda dont on connaît l’engagement politique à propos de la guerre du Vietnam. De son film, le « Retour », elle dit : « Ce que nous avons voulu montrer, sans afficher de position de principe, c’est de quelle manière des gens ont su se dépasser et gagner auprès de certains autres assez de courage pour surmonter les obstacles et régler leurs comptes avec eux-mêmes ». « Retour » nous montre l’atmosphère des USA à un moment charnière de leur histoire. Il permet aussi d’écouter beaucoup de musique de cette époque, des Beatles à Simon et Garfunkel en passant par Bob Dylan. Le climat est souvent très dur, avec des scènes bouleversantes. Mais c’est l’occasion pour Jus Voight de faire une création exceptionnelle qui lui vaudra le Grand prix d’interprétation masculine au Festival de Cannes en 1978. Jon Voight, que l’on avait découvert dans « Macadam cowboy », est ici un paralytique qui passe tout le film dans un fauteuil roulant dont il a appris à se servir avec une stupéfiante dextérité. Sans jamais montrer d’image de combat, « Retour » est un des réquisitoires les plus violents que l’on n’ait jamais tournés contre la guerre.

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