Bob de Niro retour vers le futur

Il a beaucoup déçu dans «Falling in love». Et si dans «Brazil» il restait égal à lui-même, sa participation n’excédait pas dix minutes. Et encore! Il traversait le film derrière une cagoule qui permit à une doublure de le remplacer pour tous les plans éloignés. Il est parti ensuite flirter avec succès sur les planches de Broadway…Robert de Niro Aujourd’hui, Robert de Niro fait son retour en force au cinéma avec «Mission» de Roland Joffé. Demain, on le verra aux côtés de Mickey Rourke, dans le dernier film d’Alan Parker. Et, s’il vient de se retirer de la distribution du prochain film de Philip Kaufman, on avance, ici et là, son nom dans plusieurs projets. Sergio Leone, notamment, devrait tourner avec lui un remake de «Autant en emporte le vent»! L’histoire de de Niro commence le 17 août 1943, à New York, dans l’East Side. Dix ans après, ce fils de peintre décide de devenir acteur. Mais jusqu’à présent, hormis son interprétation du lion froussard pour la représentation de «Wizard of Oz» donnée par son école, on est loin d’un début de carrière à la Mickey Rooney. Qu’à cela ne tienne, il s’inscrit au Dramatic Workshop, puis, à 16 ans, à la Stella Adler Theater School. C’est à cet âge-là qu’il débute vraiment sur les planches, dans «The bear» de Tchekhov. Puis il suit les cours du Luther James Studio, et plus tard ceux de l’Actor’s Studio, avec son ami Harvey Keitel, ancien marine, qu’il retrouvera dans «Meanstreets», «Taxi driver» et «Falling in love». Parmi ses prestations scéniques, citons «Cry in the street» de Rolph Lochner, son premier cachet, «Cyrano de Bergerac», «Long day’sjourneyinto night» d’Eugene O’Neill, «Tchin-tchin» de Frédéric Billetdoux, et en 1970 «Last stands», le troisième sketch d’une pièce de Shelley Winters, «One night stand of anoisypassenger». C’est au théâtre que Brian de Palma le remarque et pense à lui pour son premier long métrage, «The wedding party» (inédit en France). Mais un peu plus tôt, Robert de Niro quitte les États-Unis pour parcourir l’Europe en stop, et s’installe à Paris, sur la Butte. «J’ai toujours vécu sans argent, en me débrouillant», dira-t-il en 1975. C’est pendant son séjour dans la capitale qu’il fait de la figuration pour notre Marcel Carné national, dans «Trois chambres à Manhattan». Le film sort en 1965. Celui de de Palma, lui, une fois achevé, n’intéresse aucun distributeur, malgré la présence au générique de Jill Clayburgh. Ce n’est qu’après le succès de «Greetings», la deuxième collaboration du réalisateur avec de Niro, qu’il éveille quelque intérêt. Mais de Palma doit pourtant en financer lui-même la première projection publique en 1969. Suivent «Hi, Mom!», de Palma encore, toujours non distribué en France, quoique présenté (tardivement) en mars 1977 au Festival du cinéma comique de Chamrousse, et le fabuleux «Bloody Mama» avec Shelley Winters, l’un des meilleurs Corman (rebaptisé «Marna Barker et son gang» par l’éditeur de la vidéocassette). «Born to win» («Né pour vaincre», 1971) d’Ivan Passer, «The gang thatcouldn’tshoot straight» de James Goldstone (1971 aussi), et le très mauvais «Jennifer on mymind» de Noel Black qui conclut l’année, ne parviennent pas à conférer le statut de star à Bob de Niro. La renommée pointe son nez avec «Mean streets» de Martin Scorsese, en 1972, qui présente son film en ces termes : ««Meanstreets» n’est pas une tranche de vie mais un opéra : fortuit, intense et violent. Il n’y a pas réellement d’intrigue à sa base : les gens du film sont le récit.» C’est la performance de de Niro dans «Mean streets» qui convainc Francis Coppola de l’employer dans «Le parrain 2» sans bout d’essai préalable. Et dès lors, le souci du détail poussé jusqu’à la manie, l’identification à outrance à un rôle, deviennent les principales caractéristiques de de Niro. L’homme caméléon. Pour interpréter aussi justement que possible le rôle de Vito Corleone, l’acteur s’installe à Palerme et enregistre ses dialogues en patois. Puis, pour les besoins du film, il adopte tous les tics de Brando. «Le parrain 2» lui vaut son premier Oscar. Un an avant la sortie du film de Coppola, de Niro s’embarque dans un projet bâtard qui n’aboutira qu’en 1979: «The swap» ( «Le contrat», alias «Sam’s song»), une horreur attribuée à Jordan Léeondopulos, mais signée Shade, et abandonnée en cours de tournage; les scènes existantes seront intégrées en tant que flash-back dans la version complétée six ans plus tard par John Broderick avec un casting complètement différent! 1975 est un bon cru. C’est l’année des retrouvailles avec Martin Scorsese et son gang, qui donnent naissance à l’un des plus célèbres rôles de de Niro : «Taxi driver», l’histoire d’un misérable Vietnam Vet qui aimerait tant devenir célèbre en «purifiant» New York… Pour l’anecdote, Diahnne Abbott, l’ouvreuse du cinéma porno qui repousse sèchement les avances maladroites de Travis Bickle, deviendra par la suite madame de Niro. La même année, l’acteur commence à travailler avec MikeNichols, mais le tournage de «Bogart slepthere» est arrêté après quelques jours. Puis c’est la rencontre avec Gérard Depardieu sur le plateau de «Novecento» (« 1900 »). Et la réputation de de Niro grandit, à tel point qu’Elia Kazan lui-même n’accepte de réaliser «The last tycoon» («Le dernier nabab», 1976), que s’il est d’accord pour prêter ses traits au personnage principal. Avec « New York, New York», en 1977, le tandem de Niro/Scorsese frappe une troisième fois, très fort. A la même époque, sort un documentaire sur le tournage de «Novecento» : «The cinema according to Bertolucci», et Diahnne Abbott donne un fils à de Niro, Raphael. Puis l’acteur part chasser le daim en Ohio, et jouer à la roulette russe au Vietnam. Il s’appelle Michael Vronsky cette fois, et porte la barbe. Jamais auparavant on ne l’avait vu le visage si dur. Pour son rôle dans «The deer hunter» («Voyage au bout de l’enfer», 1978) de Michael Cimino, il se voit nominé pour l’Oscar. En 1980, il fait la une de tous les journaux : pour «Raging Bull», de Martin Scorsese «once again», il prend trente kilos en quatre mois, et maigrit à temps pour brandir son deuxième Oscar. Alors que de Niro vient présenter le film à Rome, son taxi est pris en chasse par deux reporters italiens qui, sommés de se justifier devant les carabiniers, prétendent que l’acteur est en fait un terroriste appartenant peut-être aux Brigades Rouges. Robert de Niro est arrêté, fouillé, interrogé. La, haine des journalistes s’est allumée dans le cœur du caméléon de Los Angeles.

On a coutume de prétendre que les Américains de souche irlandaise se rangent soit du côté de la croix, soit de celui des armes. C’est bien ce qui est arrivé aux frères Spellacy dans «True confessions» («Sanglantes confessions», 1980) d’Ulu Gros-bard. Desmond (Robert de Niro), le plus roué des deux, a revêtu la soutane et l’étole des monsigno-res, et Tom (Robert Duvall) arbore l’insigne des inspecteurs de la brigade criminelle. De Niro fait ensuite une brève apparition dans le documentaire d’Annie Tresgot et Michel Ciment, «Elia Kazan outsider». 1983 est l’année de sa dernière collaboration avec Martin Scorsese, «King of comedy» («La valse des pantins»). Avec Jerry Lewis dans un contre-emploi. Malgré le succès critique, les spectateurs boudent le film. Sergio Leone se réveille alors et crée l’événement du 37e Festival de Cannes, avec «Il était une fois en Amérique». De nouveau, de Niro devient méconnaissable, et ressemble à un Jean Richard dont le cirque aurait brûlé. Les uns crient au génie, les autres à l’arnaque. Les premiers ont raison, les autres n’aiment pas le cinéma. Après une apparition express dans «Brazil» de Terry Gilliam, Bob de Niro retrouve en mars 1984 Meryl Streep, qui avait elle aussi voyagé au bout de l’enfer, et qui est » devenue une star. Mais «Falling in love» d’UluGrosbard n’est qu’un duo d’acteurs guère excitant. «Mission» de Roland Joffé, auréolé de sa récente Palme d’or, rencontre peut-être plus de succès, en dépit de critiques mitigées. Mais le plus alléchant reste à venir. «Angel heart». De Niro/Rourke. Le dingue des années 70 et celui des années 80, dirigés par Alan Parker; avec en prime Charlotte Rampling. Et, pour couronner le tout, Brian de Palma s’attaque aux «Incorruptibles». Qui interprètera Al Capone? Je vous le donne en mille. Accrochez-vous. Monsieur perfection revient.

Terry Gilliam. 1984 (Cannon),

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