Mythe et Mystère : la joconde (documentaire)

Récit historiographique et tentative d’éclairage de l’énigme d’un tableau et de son succès planétaire.

A priori, rien de très excitant: une icône qui a parcouru les siècles sans jamais se départir de son aura quasi céleste, mais a fini peu à peu par disparaître derrière un mythe avec lequel on a appris à vivre. Il faut pourtant croire son créateur, Léonard de Vinci, quand il affirme: « J’ai fait un jour une chose réellement divine. » Jean-Claude Bringuier s’est plongé à corps perdu dans les limbes de ce mythe, et c’est finalement avec une curiosité renouvelée qu’on embarque à ses côtés pour 52 minutes d’enquête sur le parcours atypique de cette femme anonyme devenue légende planétaire. Le travail de décryptage prend des allures rocambolesques. Certains décèlent derrière son sourire énigmatique le signe infaillible de la maternité quand d’autres accordent à l’étrangeté du regard si souvent convoquée la manipulation optique de Léonard de Vinci, qui inclut le spectateur dans le tableau en dirigeant le fameux regard juste derrière lui. Mais on apprend également que « Joconde » signifie « heureuse » en italien, et l’on opte finalement pour cette explication plus simple : Léonard de Vinci serait le précurseur d’une retranscription de la sérénité.

Le documentaire tente ensuite une reconstitution historique du parcours de Mona Lisa. Et c’est là que se joue le premier tour de force du film, qui confond très justement la petite histoire et la grande. Sont ainsi retracés cinq siècles riches en rebondissements: de Florence à la maison royale de France jusqu’à la chambre de Joséphine. En 1804, l’ouverture du musée du Louvre marque le début de leur aventure commune, mais en 1911, c’est la première rupture avec l’enlèvement spectaculaire de la muse, qu’on ne retrouvera que deux ans plus tard sous le lit d’un peintre en bâtiment florentin … A la suite de cet épisode, les pérégrinations successives de La Joconde seront placées sous haute protection: vers le Quercy pendant la Seconde Guerre mondiale, puis à New York, Moscou ou Tokyo… le film prend alors de l’ampleur, en partant à la recherche des répercussions planétaires de la légende européenne, devenue symbole de notre participation à la globalisation culturelle. Qui dit mythe dit aussi reproduction, et les avatars de la Joconde ne manquent pas. Dès le XVIIe siècle, on dénombre une cinquantaine de copies, au début du XXe, on découvre des Mona Lisa à la Van Gogh, Gauguin ou Fernand Léger … En 1919, le trublion Duchamp entame sa désacralisation, en l’affublant de moustaches et en affirmant qu’LHOOQ (« Elle a chaud au cul ») ! C’est la voie ouverte à toutes les dérives artistiques, mais aussi publicitaires: certains iront jusqu’à imaginer sa mort à elle, l’éternelle … On la retrouve également en vrac et à toutes les sauces chez le collectionneur Jean Margat, jocondomaniaque et auteur du Petit Traité de Jocondologie, qui nous présente quelques objets « jocondisés »: des chaussettes pour touristes japonais à la marque de sardines dédiée au commandant Cousteau en passant par les préservatifs des années 50.

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